507.Inondation à Venise : le désastre aurait pu être évité Un vaste projet d'infrastructure devait protéger la Sérénissime
Au revoir Venise.
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Un vaste projet d'infrastructure devait protéger la Sérénissime des hautes marées. Mais après 16 années de travaux, il n'est toujours pas opérationnel.
De notre correspondant à Rome, Quentin RaverdyLa célèbre place Saint Marc a les pieds dans l'eau.
© MARCO BERTORELLO / AFP
Au lendemain de la haute marée qui a submergé Venise, la ville et ses habitants tentent de reprendre pied. La cité des Doges a connu l'une des plus grandes « acqua alta » de son histoire, avec des niveaux de marée enregistrés à plus de 1,85 m. Un premier bilan humain fait état de deux morts et, côté matériel, les dommages sont « inestimables », déplore le maire de la ville, Luigi Brugnaro. L'élu parle de « dévastation » dans les rues de Venise. Quatre-vingts pour cent de la ville est sous les eaux, avance pour sa part le président de la région Vénétie, Luca Zaia. Un conseil des ministres est prévu à Rome jeudi après-midi pour déclarer l'état d'urgence pour catastrophe naturelle pour la zone de Venise.
Après la stupeur vient le temps de la colère pour les Vénitiens. Depuis des années, les habitants de la ville italienne se sont vu promettre un rempart face aux incursions toujours plus régulières des eaux de l'Adriatique. On y réfléchissait déjà au lendemain de l'incroyable acqua alta de 1966, le record jamais observé à Venise. Il faudra attendre près de quarante ans pour que commencent finalement, en 2003, les travaux du projet MOSE (acronyme de Module Expérimental Electromécanique) : un gigantesque mécanisme de 78 cloisons mobiles immergées aux entrées des trois embouchures (Lido, Malamocco et Chioggia) de la lagune de Venise. Délestées de leur eau sur commande, ces digues artificielles doivent ainsi contenir l'eau et protéger la Sérénissime lors des grandes marées.
Mais hier soir, MOSE (Moïse, en italien) est resté immobile. Et pour cause, la réalisation de l'ouvrage n'est pas encore terminée, au grand dam des Vénitiens. Complété à plus de 90 %, le chantier accuse déjà trois années de retard. Et il faudra que les citoyens de la cité des Doges prennent encore leur mal en patience. La phase de « gestion expérimentale » n'est pas prévue avant l'été 2020 et la livraison définitive du projet par le consortium Venezia Nuova ne devrait pas se faire avant la fin 2021.
Des retards expliqués en partie par la vaste affaire de corruption qui a éclaboussé le projet en 2014. Après une longue enquête de trois ans, plus d'une trentaine de personnes sont arrêtées, dont le maire de Venise de l'époque, Giorgio Orsoni, accusé d'avoir accepté des pots-de-vin de la part du consortium. Le président de la région, Giancarlo Galan, ancien ministre de Silvio Berlusconi, tombera également dans ce scandale. À la suite de ces révélations, le projet est alors placé sous le contrôle d'administrateurs spéciaux de l'État.
Le point 13/11