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Guy Laplagne
23 septembre 2019

324.Mediator: début du procès de l’un des plus grands scandales sanitaires français Par RFIPublié le 23-09-2019 Modifié le 23-09

Enorme scandale enfin jugé. Espérons des sanctions à la hauteur. N'oublions pas toutes ces victimes!

Va t on en tirer les enseignements nécessaires ? Le ver est toujours dans le fruit.

 

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Mediator: début du procès de l’un des plus grands scandales sanitaires français
mediaLe groupe Servier est accusé d'avoir «dès le début des années 1970, sciemment caché les propriétés pharmacologiques réelles du Mediator».REUTERS/Charles Platiau

Le procès pénal du Mediator s’ouvre ce lundi 23 septembre au tribunal correctionnel de Paris. Ce médicament, présenté comme un adjuvant au traitement du diabète, est responsable de la mort de 1 500 à 2 100 morts en France, en raison de ses effets toxiques sur le cœur. Le 2e groupe pharmaceutique français, le laboratoire Servier, qui le fabriquait, comparaît notamment pour escroquerie, tromperie aggravée, et blessures et homicides involontaires par violations manifestement délibérées.

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Dans ce procès hors-norme qui va s'étaler sur 7 mois, près de 2 700 victimes se sont portées parties civiles tandis que 23 prévenus, 11 personnes physiques et 12 morales doivent comparaître. Qu’est donc que le Mediator ? Cette simple question est au cœur du procès. Car le laboratoire Servier est accusé d’avoir dissimulé la vraie nature du médicament et sa dangerosité.

Au cours de ses 33 années de commercialisation, le Mediator a été présenté aux autorités de santé comme un médicament contre l’excès de cholestérol et de triglycérides, et comme un adjuvant au traitement du diabète de type 2. Une présentation trompeuse, dictée à l’origine par des considérations commerciales selon les juges d’instruction.

« Servier a mis en œuvre tout un tas d’initiatives… »

Pour les magistrats, le Mediator est en réalité un anorexigène, autrement dit un coupe-faim, dérivé de l’amphétamine, similaire à l’Isoméride et au Pondéral, les autres coupe-faim de Servier, qui étaient, eux, vendus comme tels, par la firme ; ces trois médicaments appartiennent à une famille de molécules, les fenfluramines, dont les risques sont documentés depuis les années 1990. « Les risques de cette amphétamine sont de plus en plus connus à partir de 1995 », indique le Dr Irène Frachon, pneumologue au CHU de Brest, et qui est la lanceuse d’alerte grâce à laquelle le Mediator a été interdit en 2009. « Servier a mis en œuvre tout un tas d’initiatives pour que personne ne se rende compte que le Mediator est bien une amphétamine, dangereuse, avec en particulier des effets toxiques semblables à ceux de l’Isoméride, un coupe-faim de Servier interdit en 1997 », poursuit-elle.

Ainsi, tandis que les coupe-faim « officiels » du laboratoire sont interdits en 1997, car pouvant provoquer une pathologie très grave, l’hypertension artérielle pulmonaire, et des atteintes des valves cardiaques, le Mediator, lui, continue d’être autorisé et commercialisé, malgré sa parenté chimique avec ces produits. Comble de l’histoire, il est même prescrit de plus en plus comme coupe-faim.

Je ne peux plus rien faire. Je ne vis plus...

Rencontre avec une victime du Mediator22/09/2019 - par RFIÉcouter

Agence du médicament, inaction coupable

Dès la fin des années 1990, les alertes se multiplient auprès de l’Agence publique en charge de la sécurité du médicament. L’agence européenne pointe auprès d’elle la proximité du Mediator avec l’Isoméride. Des cas de valvulopathies et d’hypertension artérielle pulmonaire associés au Mediator lui sont notifiés à partir de 1999. Il faudra attendre 2009 pour que l’Agence du médicament l’interdise ; elle est poursuivie pour blessures et homicides involontaires par négligence. Pour Charles Joseph-Oudin, avocat de plusieurs victimes, l’Agence « n’a pas agi suffisamment vite par culture de l’institution, qui ne savait pas écouter les alertes, mais aussi certainement à la faveur de membres de l’institution qui avaient des intérêts dans les affaires du laboratoire Servier ». Ainsi d’anciens experts de l’Agence du médicament seront aussi sur le banc des prévenus au procès. Ils devront répondre du délit de prise illégale d’intérêts.

Cependant, au tribunal, il manquera l’un des principaux protagonistes de l’affaire : Jacques Servier, patron fondateur du laboratoire, qui avait été mis en examen. Il est mort à l’âge de 92 ans en 2014.

RFI Priorité Santé
@prioritesante

Demain commence le procès au pénal du scandale du !
L'occasion pour @prioritesante sur @RFI de revenir sur les scandales sanitaires et les relations entre laboratoires et patients !

RDV à 9h10 TU !

Photo : Photo : DES Daughter by Flickr

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Merci Madame!

++++ Article du Point:

C'est un procès hors norme qui débute, lundi 23 septembre, à Paris : celui des laboratoires pharmaceutiques, Servier en tête, et des professionnels de santé qui ont permis la commercialisation d'un produit suspecté de provoquer de très graves maladies cardiaques et pulmonaires. Compte tenu du nombre de victimes et de la complexité de l'affaire, six mois de débats sont prévus. À la veille de la première audience, Irène Frachon, pneumologue au centre hospitalier de Brest qui a lancé l'alerte sur le Mediator, livre au Point ses quatre vérités.

Le Point : Le benfluorex, plus connu sous le nom de Mediator, est à l'origine d'un immense scandale sanitaire. Combien de personnes ont été victimes de ce produit toxique ?

 

Irène Frachon, pneumologue au CHU de Brest, a alerté les autorités de la dangerosité du Mediator dès 2007.  

© FRED TANNEAU / AFP

Irène Frachon : Lorsque survient une catastrophe d'ampleur, ce chiffre est toujours difficile à calculer. Pour comprendre la difficulté que nous avons à cerner le nombre de victimes, essayons de nous figurer le problème suivant. Imaginons un bateau qui prend la mer avec 500 passagers. Cette embarcation coule. Un navire de secours récupère 100 survivants. Dans les jours qui suivent, 15 corps sont repêchés. Combien pensez-vous que nous ayons de victimes ?

 

400 ? Si aucun autre passager n'a été repêché, par ailleurs…

C'est ça. Nous avons 400 morts ou disparus. Cette statistique, c'est la mortalité attribuable au naufrage. Les 15 morts récupérés dans l'eau ou sur les côtes, c'est la mortalité directement imputable au cas par cas à la catastrophe.

Si nous reprenons ces deux catégories, quelles sont les statistiques ?

Entre 1976 et en 2009, près de 5 millions de personnes se sont vu prescrire du Mediator. En croisant plusieurs bases de données de l'Assurance maladie, on a pu calculer la surmortalité induite par les pathologies provoquées par cette molécule et estimer le nombre total de décès dus au Mediator, pendant toute la durée de commercialisation et au-delà, à environ 2 000 morts.

Pourquoi cette mortalité ?

Parce que ce prétendu médicament est, en réalité, un poison. Si l'on résume à grands traits, ce produit se dégrade en une molécule toxique : la norfenfluramine. Cette molécule, de la famille des amphétamines, provoque des problèmes de santé gravissimes : des valvulopathies cardiaques et de l'hypertension artérielle pulmonaire.

Lire aussi Mediator : 114,7 millions d'euros ont déjà été versés aux victimes

Ce n'était pas un traitement efficace contre le diabète : c'était juste un coupe-faim.

Au début des années 1990, la toxicité d'autres médicaments du laboratoire Servier (l'Isoméride et le Pondéral) avait été établie, ce qui avait d'ailleurs conduit au retrait de ces produits. Comment le Mediator, dont le principe actif est de même nature, a-t-il pu rester en vente ?

C'est ce qu'établira le procès qui commence.

Vous avez joué un rôle majeur dans la révélation des dangers du Mediator. Comment avez-vous découvert l'ampleur du problème ?

J'ai plongé dans cette affaire à partir de 2007. Cette année-là, en prenant en charge une femme en surpoids souffrant d'une maladie rare, j'ai réalisé que son médecin lui avait prescrit du Mediator pour traiter son diabète. Cela m'a intriguée. Plus tôt dans ma carrière, j'avais vu des patientes atteintes de la même pathologie après avoir recouru à un coupe-faim de chez Servier. J'ai enquêté et j'ai découvert que le Mediator était une forme de « repackaging » de ce produit connu sous le nom d'Isoméride.

Lire aussi Mediator : l'étrange choix de l'Académie de médecine

Ce n'était donc même pas un médicament contre le diabète ?

Il y avait un double mensonge. Ce n'était pas un traitement efficace contre le diabète : c'était juste un coupe-faim. Et, par ailleurs, on avait dissimulé la dangerosité de cette molécule qui n'est, encore une fois, rien d'autre qu'une amphétamine trafiquée.

Comment se fait-il que l'Agence du médicament n'ait rien vu ?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que ses experts ont été mauvais. Certains le reconnaissent aujourd'hui.

Certains ont-ils choisi de fermer les yeux ?

Plusieurs experts de cet établissement public devront répondre à la justice de potentielles prises illégales d'intérêts. « Prise illégale d'intérêts », c'est le parfum de la corruption !

C'est-à-dire ?

Certains experts auprès de l'agence étaient, dans le même temps, consultants, parfois occultes, de Servier.

Le laboratoire Servier a gagné autour d'un milliard d'euros avec le Mediator.

Les agences étrangères, elles, n'ont pas attendu 2009 pour réagir…

Oui. Les Belges n'ont jamais donné l'autorisation de mise sur le marché au Mediator. En Suisse, les autorités ont demandé à trois reprises au laboratoire Servier en quoi la molécule du Mediator différait de ses coupe-faim toxiques. Faute de réponse, elles s'apprêtaient à sévir lorsque la direction du laboratoire a décidé de retirer de la vente ce produit. Officiellement parce qu'il ne s'en vendait pas assez en Suisse. Ce qui a empêché un signalement de pharmacovigilance.

Et en Espagne ?

Dès 2003, un cas de valvulopathie grave survenu dans ce pays a fait l'objet d'une publication scientifique. Là encore, Servier a décidé de lui-même de retirer du marché le Mediator avant tout signalement aux autorités européennes. Il convient d'ailleurs de préciser que cela ne pourrait plus se reproduire aujourd'hui. Dès qu'un produit est retiré de la vente, même à l'initiative du labo, c'est désormais considéré comme un signal d'alerte en matière de pharmacovigilance.

 

Le procès du laboratoire pharmaceutique Servier va durer plus de six mois. 

© Jean Francois Frey / MAXPPP / PHOTOPQR/L'ALSACE

Combien d'argent le laboratoire Servier a-t-il gagné avec le Mediator ?

 

Les estimations tournent autour d'un milliard d'euros.

Avez-vous le sentiment de ne pas avoir été entendue assez tôt ?

Ma hiérarchie directe a été formidable. Le directeur du CHU m'a soutenue dès le début. Au-dessus, c'est une autre histoire.

Avez-vous eu des pressions de la part de Servier ?

Mon livre a été censuré sur un référé de Servier. Nous avons gagné en appel, ensuite, c'étaient des droits de réponse longs comme le bras à chaque interview… Mais ils n'ont plus osé m'attaquer frontalement !

Quelle leçon tirez-vous de cette affaire ?

J'ai porté l'alerte sur le Mediator. Au tribunal, désormais, de juger cette affaire. Je suis citée comme témoin au procès par le parquet et par Servier et, à ce titre, m'abstiendrai de m'exprimer publiquement pendant toute la durée du procès.

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