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Guy Laplagne
24 août 2019

198.En 2018, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a reçu 868 signalements de tensions ou de ruptures d’approvisio

Encore un sujet traité superficiellement par la ministre de la santé.

Il faut prévenir comme le disent des professionnels.

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  • En 2018, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a reçu 868 signalements de tensions ou de ruptures d’approvisionnement de médicaments.
  • C’est vingt fois plus qu’il y a dix ans.
  • En cause : la délocalisation de la production de la majorité des médicaments tombés dans le domaine public, qui sont les plus couramment utilisés par les patients.

Antibiotiques, vaccins, corticoïdes, traitements contre l’hypertension, l’épilepsie ou encore contre le cancer : les tensions et ruptures d’approvisionnement touchent des centaines de médicaments et, par ricochet, de nombreux patients et patientes privés de leur traitement. Face à ce phénomène chronique, une vingtaine de médecins et professeurs hospitaliers ont signé ce dimanche une tribune dans le JDD. « Très rares il y a une dizaine d’années, les pénuries de médicaments se multiplient. En 2018, selon l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), on a noté 868 signalements de tensions ou de ruptures d’approvisionnement dont les malades sont les premières victimes lorsque cela concerne des médicaments d’intérêt thérapeutique majeurs (MITM) pour lesquels il n’y a, le plus souvent, pas d’alternative efficace disponible. C’est 20 fois plus qu’en 2008 (44 signalements) ». Comment expliquer ce phénomène chronique qui empire d’année en année ?

La production de médicaments délocalisée

Il y a encore une quinzaine d’années, les pénuries de médicaments étaient des phénomènes ponctuels, peu courants. Mais ça, c’était avant. Avant que les grands groupes pharmaceutiques – américains et européens — ne délocalisent la production d’un grand nombre de médicaments hors de l’Union européenne, principalement du côté de l’Inde et de la Chine, dans le but de baisser les coûts de production

« Ces pays sont aujourd’hui les premiers fournisseurs mondiaux des principes actifs entrant dans la composition de médicaments dont le prix de vente est peu élevé, mais qui comptent parmi les plus utilisés par les patients », explique à 20 Minutes le Pr François Bricaire, chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris et signataire de la tribune. « Ils produisent les principes actifs de 80 % des médicaments passés dans le domaine public » (lorsque le brevet d’un médicament tombe dans le domaine public, le laboratoire découvreur de la molécule en perd l’exclusivité commerciale), poursuit-il. Et le reste ? « Les pénuries ne touchent pas les très chères innovations thérapeutiques mais des médicaments peu coûteux qui, bien qu’anciens et tombés dans le domaine public, constituent toujours l’essentiel de la pharmacopée », déplorent les signataires de la tribune.

Des pénuries lourdes de conséquences pour les patients

Résultat : aujourd’hui, près d’un Français sur quatre est touché par les épisodes fréquents de pénuries de médicaments. Cancer, endométriose, hypertension ou encore épilepsie : les médicaments permettant de traiter ces maladies sont concernés par ces ruptures ou tensions d’approvisionnement. Les plus chanceux parviennent, en faisant le tour des pharmacies de leur région, à trouver le traitement qu’ils prennent au quotidien.

Mais tous et toutes n’ont pas cette chance. Parmi les médicaments en rupture de stock : l’Immucyst, un traitement formulé à partir du vaccin BCG utilisé pour prévenir les risques de récidives du cancer de la vessie. Pour les patients privés de ce traitement, le risque de récidive est multiplié par trois et le nombre d’ablations de la vessie a quant à lui été multiplié par 4,5, selon les résultats observés par Marc Colombel, professeur d’urologie à l’hôpital Edouard-Herriot de Lyon. 

De son côté, l’Institut national du cancer, qui souligne qu’une quarantaine de médicaments essentiels en cancérologie font l’objet de tensions importantes, estime que ces pénuries pourraient « conduire à des décès prématurés ».

la Ligue contre le cancer
@laliguecancer

Selon l’Institut National du Cancer @Institut_cancer, une quarantaine de médicaments essentiels en font l’objet de tensions importantes, qui pourraient « conduire à des décès prématurés ». https://twitter.com/axelkahn/status/1163323641787850753 

Axel Kahn@axelkahn

PÉNURIE DE MÉDICAMENTS IMPORTANTS. @laliguecancer, mobilisée depuis le début, fait des propositions : sécurisation de stocks de plusieurs mois, incitations à la fabrication européenne des produits essentiels, voire si indispensable production sous l’égide de services de santé.

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« Gérer les pénuries ne suffit pas, il faut les prévenir »

Début juillet, la ministre de la Santé Agnès Buzyn présentait sa feuille de route destinée à enrayer le phénomène de pénuries chroniques de médicaments. « Aujourd’hui, les politiques existantes consistent à gérer les épisodes de pénuries de médicaments, observe le Pr Bricaire. Mais nous devons aller beaucoup plus loin et prévenir ces pénuries, en étant maîtres de notre production médicamenteuse », prescrit-il. Pour la vingtaine de médecins et professeurs signataires de la tribune, la priorité est de « constituer des stocks des médicaments les plus essentiels et régulièrement soumis à des pénuries », expose-t-il.

Des préconisations qui rejoignent celles formulées par la mission d’information du Sénat sur la pénurie de médicaments et de vaccins. Dans son rapport publié en octobre dernier, la mission proposait de « relancer une production pharmaceutique de proximité par la mise en place, expérimentale, d’exonérations fiscales ciblées au bénéfice d’entreprises s’engageant sur des investissements pour l’implantation en France de sites de production de médicaments ou de substances pharmaceutiques actives essentielles pour la sécurité sanitaire européenne, assorties de contreparties exigeantes ». Dans le document, qui sert de base à la feuille de route de la ministre de la Santé, les sénateurs appellent aussi à « responsabiliser les industriels », au moyen d’une plus grande « transparence sur l’historique de leurs ruptures » et « en sanctionnant financièrement les laboratoires qui n’assureraient pas un approvisionnement approprié et continu du marché français

 

 

20 minutes

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Lire aussi:

 

 

  • De nombreux médicaments et vaccins sont fréquemment en tension ou en rupture d’approvisionnement.
  • Certains patients sont contraints de faire le tour des pharmacies chaque mois pour se procurer leur traitement.
  • Un phénomène chronique source d’angoisse pour les patients et qui peut mettre leur santé en péril.

Surmonter l’angoisse, trouver le bon traitement et tenter de reprendre un quotidien serein et en bonne santé malgré la maladie. Ça, c’est ce qui est censé se passer quand tout va bien, et que les tiroirs des pharmacies hospitalières et de ville sont correctement achalandés. Problème : en pratique, les pénuries de médicaments sont de plus en plus fréquentes, vingt fois plus nombreuses qu’il y a dix ans. Antibiotiques, traitements contre le cancer, l’hypertension, antiépileptiques ou encore pilule pour traiter l’endométriose : les médicaments en tension ou rupture d’approvisionnement concernent de nombreuses maladies, et de très nombreux patients et patientes parfois contraints d’interrompre le traitement médicamenteux qui les maintient en bonne santé, faute de pouvoir se les procurer. Outre le stress que ce phénomène cause, il n’est pas sans impact sur la santé des malades.

« Il peut revenir dans une semaine comme dans six mois »

Pour soigner son endométriose, Mélinée prend du Lutéran (un progestatif) depuis plusieurs années. « Depuis plusieurs mois, il est de plus en plus difficile de s’en procurer, et au mois de juillet, la pharmacie a consulté tous les laboratoires qui en fabriquent, et tous étaient en rupture de stock. J’ai paniqué car sans ce traitement, mes règles sont hémorragiques et me causent des douleurs insupportables, accompagnées de nausées. Ma gynécologue m’a heureusement délivré un traitement de substitution (Lutényl ou Colprone), qui pour le moment est encore disponible. Mais à ce jour, je n’ai obtenu aucune indication sur la date de retour de mon traitement initial en pharmacie »

Même maladie, même traitement et même galère pour Florence. « Ce traitement me permet de vivre sans opération, sans aucun arrêt maladie, ni saignement et douleurs, pour mener une vie personnelle et professionnelle normale. Mais depuis deux ans, j’ai beaucoup de mal à trouver ce médicament qui est régulièrement en rupture. Et là, il est en rupture totale, ainsi que tous ses génériques ! J’ai réussi à me procurer un mois de traitement, mais après ? A la pharmacie on me dit : “il peut revenir dans une semaine comme dans six mois”. Sauf que moi, sans ce traitement, j’atterris aux urgences, redoute la jeune femme. Je vis dans l’angoisse de ne pas pouvoir me procurer mon traitement ».

« Je fais en moyenne cinq pharmacies chaque mois avant de trouver mon traitement »

Alors, pour trouver les médicaments dont ils ont chaque jour besoin, certains font le tour des pharmacies, jusqu’à trouver leur précieux traitement, comme Alain, qui depuis plusieurs mois a « beaucoup de difficultés » à trouver son médicament prescrit contre l’hypertension. « Il faut que je fasse tous les mois plusieurs pharmacies avant de pouvoir me le procurer. Cela me prend beaucoup de temps et génère énormément de stress. J’envisage d’aller trouver mon médecin traitant pour voir s’il existe un autre traitement possible ».

Jacques, qui souffre d’ulcères chroniques de l’œsophage et de l’estomac, n’a pas la possibilité de changer de traitement. « Depuis six mois, j’ai beaucoup de mal à me procurer du Rabéprazole, ce médicament que je prends au quotidien et qui est essentiel à ma survie. Donc chaque mois, je fais en moyenne cinq pharmacies avant de le trouver, raconte-t-il. Et il n’y a aucun traitement alternatif dans mon cas : si mon médicament venait à me manquer, je mourrais ».

Cette peur, Anne Marie ne peut pas non plus s’en défaire. « Je suis atteinte de la maladie de Parkinson et d’une aplasie médullaire. Tous les mois, c’est le même stress qui me ronge, confie-t-elle. Pour trouver mon traitement contre Parkinson, il m’est déjà arrivé de faire toutes les pharmacies de la région ! Et pour mon aplasie, le médicament qui m’est prescrit est tellement rare que je le commande systématiquement plusieurs semaines à l’avance. Ces ruptures d’approvisionnement, c’est très angoissant ».

« Comment peut-on en arriver là en France, en 2019 ? »

Depuis sa greffe de rein il y a vingt ans, Nathalie doit prendre de la cortisone tous les jours. « Je viens de vivre ma première pénurie au mois de juin. Ma pharmacie n’a pas pu me délivrer mon médicament pendant six semaines, et il était introuvable dans les autres pharmacies. Comment peut-on en arriver à manquer de traitements aussi basiques ? »

Parfois, des traitements de substitution peuvent être prescrits. A condition bien sûr qu’ils ne soient pas non plus en rupture de stock, comme Françoise en a fait l’amère expérience. « Pour soigner ma bipolarité, je prends du Dépamide, qui est en rupture de stock depuis un moment. Face à cette pénurie, le médecin m’a prescrit du Dépakote, qui à son tour n’est plus approvisionné ! Je ne sais plus comment faire pour me soigner, déplore Françoise. Je me demande comment les laboratoires justifient ces pénuries qui sont dangereuses pour notre santé ».

Et quand aucun traitement de substitution n’existe, les patients se retrouvent bien seuls face à leur désarroi. « Je suis atteinte d’une mastocytose systémique, une maladie auto-immune, explique Catherine. Je suis un traitement à base d’Intercron depuis plus de dix ans. Le problème, c’est que le laboratoire français qui fournissait mon médicament en a subitement arrêté la production et aujourd’hui, il n’est plus commercialisé. Tant que j’ai pu, j’ai trouvé des médicaments en Italie puis en Suisse, mais aujourd’hui, le médicament est introuvable, et mon état de santé se dégrade : je fais plusieurs malaises par semaine, mes allergies sont plus fortes et plus fréquentes que jamais, je suis très fatiguée et cela m’affecte dans mon travail ». Pour Catherine, « l’alternative sera un nouveau protocole thérapeutique, avec tous les aléas et effets secondaires que cela implique. Je pense que ma santé est mise en danger par des labos qui s’en foutent ! C’est devenu un parcours du combattant de se soigner. Comment peut-on en arriver là en France, en 2019 ? Que fait l’Etat ? Que font les labos ? Combien de morts faudra-t-il avant de réagir 

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